L’essor des contenus visuels sur internet a entraîné une multiplication des litiges liés à l’usage non autorisé de photographies. De nombreuses entreprises, institutions, associations ou médias reçoivent aujourd’hui des courriers de mise en demeure, souvent adressés par des mandataires comme Pixways, PicRights, Copytrack, Copyright Agent, Pixsy ou PhotoClaim.
Ces demandes visent à obtenir une indemnisation pour la prétendue reproduction non autorisée d’une image protégée par le droit d’auteur. Si certaines réclamations peuvent être fondées, une part importante d’entre elles s’avère abusive ou juridiquement contestable.
Avant toute réponse ou régularisation, il est donc crucial de comprendre les fondements du droit des photographes, les conditions d’application de ces droits, ainsi que les leviers de défense permettant d’éviter un paiement injustifié. Notre cabinet intervient précisément à ce stade, en assurant une analyse rigoureuse des réclamations et une stratégie de réponse adaptée à chaque cas.
Le cadre juridique : quelles protections pour les photographies ?
En droit français, les photographies peuvent bénéficier de deux régimes de protection, selon leur nature:
La protection par le droit d’auteur (CPI, art. L. 111-1 et suivants)
Selon l’article L. 112-2 9° du Code de la propriété intellectuelle (CPI), les œuvres photographiques sont protégées au titre du droit d’auteur à condition d’être originales, c’est-à-dire de porter l’empreinte de la personnalité de leur auteur.
Cette originalité s’apprécie à travers les choix créatifs et personnels réalisés par le photographe, notamment :
- au moment de la préparation (réglages techniques, cadrage, angle de vue),
- lors de la prise de vue (composition, lumière, mise en scène),
- et lors du tirage ou du traitement numérique (contraste, sélection, retouches).
→ Tribunal judiciaire de Marseille, 27 mars 2025, 23/05057 : Il faut, mais il suffit, que l’œuvre dont la protection est revendiquée porte une empreinte réellement personnelle et traduise un travail et un effort créateur exprimant la personnalité de son auteur pour que celui-ci puisse se revendiquer de la protection organisée par le code de la propriété intellectuelle.
La protection subsidiaire par le droit des producteurs de bases de données ou des droits voisins (CPI, art. L. 341-1)
À défaut d’originalité, certaines photographies peuvent être protégées par des droits voisins, notamment si elles relèvent d’un investissement substantiel ou d’un effort technique spécifique. Ce régime ne permet cependant pas d’engager une action en contrefaçon, mais uniquement une action en responsabilité civile.
Quelles sont les conditions pour engager valablement une demande d’indemnisation ?
Pour qu’une demande d’indemnisation soit recevable, plusieurs éléments doivent être strictement démontrés par le demandeur (auteur, société ou mandataire) :
La preuve de l’originalité de l’image
Il ne suffit pas d’affirmer qu’une photographie est protégée. Le demandeur doit démontrer que l’image est suffisamment créative pour bénéficier du régime du droit d’auteur. Les photographies standardisées (packshot, images techniques, vues d’ensemble sans mise en scène) ne sont pas protégées automatiquement.
→ Cour d’appel de Paris, 2022-11-02, n° 20/10036 : Il incombe à celui qui entend se prévaloir des droits de l’auteur de caractériser l’originalité de l’œuvre revendiquée, c’est à dire de justifier de ce que cette œuvre présente une physionomie propre traduisant un parti pris esthétique et reflétant l’empreinte de la personnalité de son auteur.
La preuve de la qualité pour agir
En vertu de l’article L. 113-1 CPI, la qualité d’auteur appartient uniquement à une personne physique. Si une société agit, elle doit prouver :
- qu’un contrat de cession valide lui a été signé par l’auteur,
- que le droit d’ester en justice lui a également été expressément transféré.
→ Cass. civ. 1, 19 février 2013, n° 11-21.310 : à défaut de mandat, la société est irrecevable à agir.
La preuve de la reproduction et du préjudice
Le demandeur doit également prouver :
- que l’image a bien été utilisée par le destinataire du courrier,
- que cette utilisation est postérieure à l’existence des droits invoqués,
- que l’usage n’est ni autorisé, ni justifié par une exception (citation, pédagogie, information, panorama).
La preuve se fait en principe par constat d’huissier. Une simple capture d’écran n’a qu’une valeur probatoire très limitée, sauf si elle est réalisée dans les règles techniques du constat judiciaire.
Pourquoi il est essentiel de ne pas répondre seul à ces courriers
Les sociétés mandatées envoient souvent des courriers intimidants, chiffrant une indemnisation forfaitaire (parfois majorée), avec des délais courts et des menaces de poursuites judiciaires.
Mais ces demandes ne sont pas des décisions de justice, et leur fondement juridique mérite d’être vérifié.
Répondre sans assistance, ou signer un accord de règlement, vous expose à reconnaître à tort une infraction ou à payer un montant injustifié. N’hésitez pas à nous envoyer le courrier.
Notre approche : sécuriser, contester, négocier si nécessaire
À réception d’une mise en demeure :
- nous vérifions la recevabilité de la demande : originalité, cession de droits, mandat, preuves de reproduction ;
- nous contestons les demandes infondées ou excessives (y compris les barèmes arbitraires) ;
- si un usage non autorisé est établi, nous encadrons une régularisation proportionnée, respectueuse du droit comme des contraintes économiques.
Dans de très nombreux cas, notre intervention permet de faire annuler la demande.